Partout, sur Internet, dans les journaux ou à la télévision, l’expérience personnelle s’affiche, s’exhibe et se veut référence. Cette indécence repose sur une inversion des valeurs. Elle se fonde surtout et partout sur l’idée du même. L’idée du même pense : “J’ai vécu cela, mon expérience reflète un sentiment universel. Je veux dire ce que j’ai vécu. Je me pose en témoin incontournable”. C’est confondre l’universel et le général. Ce qui est oublié, incompris, c’est la différence qui réside entre chaque homme ; et chaque homme est singulier. Non pas singulier par ses orientations sexuelles ou par ses manies, mais intrinsèquement. Voilà bien un vieux concept neuf au début du XXIe siècle. Par son expérience, par sa culture et par sa nature, chaque homme montre une facette de l’Homme, et chaque facette est singulière. Créer à l’image de Dieu. Or il nous est impossible, sinon en regardant les hommes et en les considérant comme tous singuliers, d’embrasser Dieu. L’oublie de Dieu ramène au même. Chacun y va de sa contine qui, même si elle peut dire le tragique d’une existence, n’est qu’une contine car elle ne commence même pas à dire le tragique de l’Homme.
Catégorie : Théorie de la vie
Au coeur des ténèbres, la vie
Après avoir vu « Tree of Life », je me suis longtemps interdit d’écrire sur ce film. Deux forces s’affrontaient en moi. Subjugué par la poésie, par l’état de béatitude dans lequel j’étais plongé, j’avais peur de troubler la surface de cette oeuvre. Je me suis tellement emmitouflé dans le mystère de ce film que je ne comprenais pas les réactions négatives et étais incapable d’avoir un esprit critique1. “Tree of Life” s’appuie sur un livre de la Bible, “le Livre de Job”. Et ce livre ténébreux parle de la vie et de la relation de l’homme à Dieu. Ce qui est présent dans beaucoup de livres de la Bible. Mais le Livre de Job commence par un dialogue entre Dieu et Satan qui se jouent de l’homme. L’impression que nous laisse ce dialogue inaugural est étrange. Bien sûr, le dialogue de début ne serait pas tout à fait de la même époque que le récit central. Peu importe en fait, l’impression laissée se représente au cours du livre. Comment Dieu peut-il se jouer de sa créature bien-aimée ? Une conclusion hâtive rend compte de l’invraisemblable de la situation. En vérité, une fois l’écorce ôtée, le Livre de Job délivre le coeur de la relation entre Dieu et l’homme. Et “Tree of Life”, le film de Terrence Malick, a cette même ambition.
De quoi Steve Jobs est-il le nom ?
« Steve Jobs 1955-2011 », pouvait-on lire sur le site d’Apple le 5 octobre 2011. Jusqu’à la fin, cette signature unique, minimaliste, élégante et efficace. Sa signature. Le bruit créé par la mort de ce chef d’entreprise américain a pris le monde de court. Un peu, et la comparaison a été faite, comme pour lady Diana il y a quelques années. Pourtant la comparaison s’arrête là, lady Diana avait fini par incarner un visage d’opprimé face à une nomenclature ; vrai ou faux, ce portrait se complaisait de plus dans un rêve de princesse brisée au pouvoir évocateur mais sans prise réelle avec la réalité. La mort de Steve Jobs ne relève en rien d’un destin d’opprimé. La mort de Steve Jobs relève essentiellement de l’intimité et donc de la pudeur. La mort de Steve Jobs a résonné d’un bruit planétaire. La vie de Steve Jobs est une ode à l’intimité.
Une année qui finit…
Sur une année qui finit, on jette souvent un regard furtif. Ne pas trop s’attarder. On ne sait jamais combien de choses dont on s’est forcé à enfouir le souvenir pourraient à nouveau apparaître, à l’instar de ces fenêtres “pop up” impromptues, malpolies et irritantes sur Internet. L’exercice que l’on peut réaliser est de se concentrer très fortement pour extraire les événements importants ; les événements qui permettront de comprendre pourquoi ils ont tellement compté ; en quoi ils se sont révélés déterminants. Il est aussi important de ne pas perdre de vue le moment où l’événement apparaît.