A quels saints se vouer ?


L’affaire Marcial Maciel nous impose de poser la question du Mal. Notre époque évite de s’y frotter. Que savons-nous de l’œuvre du diable et que pouvons-nous faire pour nous en protéger ? Après avoir tenté d’occulter le bien de la vie, faut-il s’étonner que le mal se montre au grand jour ? Les œuvres du démon sont innombrables, mais l’Esprit-Saint peut tout, notamment les transformer.

Il fallait avoir la faconde de Léon Bloy pour affirmer : « Il n’y a qu’une seule tristesse, celle de ne pas être saint ». Cette question entêtante de la sainteté revient toujours comme une saison qui ne passe pas. Il existe beaucoup de choses dont nous pouvons nous débarrasser, mais jamais la question de la sainteté n’en fait partie. Elle nous est consubstantielle. Dès que nous voyons ou assistons à quelque chose de juste ou d’injuste, quelque chose relevant du bien ou du mal, nous cheminons sur la voie de la sainteté. Que ce soit vers elle ou contre elle. Il faut beaucoup de temps pour se rendre compte à quel point la question de la sainteté nous est consubstantielle. Nous sommes saints, nous sommes un temple, nous sommes partis de l’Église qui est sainte, nous sommes à l’image de Dieu qui est Saint, et pourtant nous nous ébrouons, nous tombons, nous peinons, nous nous évertuons… Si peu de résultats pour tant de promesses. C’est que la condition de saint demande quantité d’efforts et donne peu de résultats visibles.
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Au coeur des ténèbres, la vie

The-Tree-of-Life

Après avoir vu « Tree of Life », je me suis longtemps interdit d’écrire sur ce film. Deux forces s’affrontaient en moi. Subjugué par la poésie, par l’état de béatitude dans lequel j’étais plongé, j’avais peur de troubler la surface de cette oeuvre. Je me suis tellement emmitouflé dans le mystère de ce film que je ne comprenais pas les réactions négatives et étais incapable d’avoir un esprit critique1. “Tree of Life” s’appuie sur un livre de la Bible, “le Livre de Job”. Et ce livre ténébreux parle de la vie et de la relation de l’homme à Dieu. Ce qui est présent dans beaucoup de livres de la Bible. Mais le Livre de Job commence par un dialogue entre Dieu et Satan qui se jouent de l’homme. L’impression que nous laisse ce dialogue inaugural est étrange. Bien sûr, le dialogue de début ne serait pas tout à fait de la même époque que le récit central. Peu importe en fait, l’impression laissée se représente au cours du livre. Comment Dieu peut-il se jouer de sa créature bien-aimée ? Une conclusion hâtive rend compte de l’invraisemblable de la situation. En vérité, une fois l’écorce ôtée, le Livre de Job délivre le coeur de la relation entre Dieu et l’homme. Et “Tree of Life”, le film de Terrence Malick, a cette même ambition.

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Faute d’origine

Malgré les doutes de Shûsaku Endo quant à la vraie christianité des Japonais évoquée dans l’admirable « Silence », il m’apparaît aussi que le Japonais a un vrai point commun fondamental avec le chrétien dans la facilité qu’il a à se mettre à la place de l’autre. N’est-ce pas là l’un des socles fondateurs du christianisme, l’un de ces archétypes du Discours sur la Montage, que de toujours penser que notre effort n’a pas été assez important, assez prononcé, pour que l’entente émerge ? Je vois bien sûr la faiblesse du raisonnement : le Japonais essaie inlassablement de se mettre à la place de l’autre culturellement ; il désire aussi mieux se faire comprendre ; il ne connaît pas la culpabilité, mais la honte… Le chrétien doit se mettre à la place de l’autre parce qu’il pense que la faute vient de lui, ce qui ne veut pas dire qu’il a commis la faute, mais plutôt que le manque d’attention à l’autre l’a poussé à ne pas assez travailler à prévenir la faute.

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Pardonnez, il en restera toujours quelque chose…

Dans cette petite réflexion sur le pardon, je voulais juste revenir sur l’insuffisance de dire pardon. Pardonner est quelquefois d’une difficulté extrême. J’avoue garder encore quelques rancoeurs au fond de mon coeur. Je n’ai de cesse de les confesser et de demander un peu de grâce pour attendrir la dureté de mon coeur, mais non, rien n’y fait vraiment, et j’ai plutôt appris à vivre avec cette dureté que j’ai malgré tout réussi à circonscrire, que je n’ai pardonné sincèrement et intimement. Pourquoi ? Pourquoi n’arrivé-je pas à réduire en poussière cette dureté de coeur ? Elle semble comme plus forte que moi et cela m’inquiète, je ne saurais le cacher.

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Le moralisme gluant de l’Occident

Il est toujours amusant et instructif de se rendre compte des contradictions de ses adversaires. Comment, de cette société moderne si fière de sa liberté, de sa façon de concevoir les choses intimes, cette société de la sensualité (quand on a bien pris soin de confondre sensualité et pornographie), émerge une société pudibonde, restrictive, voyeuriste et surtout moraliste (il faut relire ici l’essai de Jean Marie Domenach : Une Morale sans moralisme). Là où cette société moderne plénipotentiaire tente de confondre la morale du catholicisme qu’elle portraitise comme archaïque, elle developpe très rapidement des anti-corps sous la forme d’un moralisme qui ne se sent bien qu’en jugeant le voisin. C’est la morale petit-bourgeois. C’est un trait de caractère français. Mais que d’autres pays d’Europe partagent avec elle.

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